Electrolyse
L’élimination de la rouille par électrolyse est pour moi la solution la plus conservatrice pour les baïonnettes. Sa mise en œuvre est finalement assez simple bien qu’elle demande un peu de matériel.
- Le principe

L’électrolyse est un processus d’échange au cours duquel l’énergie électrique est transformée en énergie chimique. La réaction a lieu dans une solution d’eau salée : l’électrolyte. Les ions doivent pouvoir circuler librement dans l’eau pour passer d’une électrode à l’autre. Les deux électrodes sont reliées par l’électrolyte et par un générateur de courant électrique.
La rouille est essentiellement de l’oxyde de fer (Fe2O3) qui se forme lorsque le fer réagit avec l’oxygène et l’eau. L’électrolyse utilise un courant électrique pour décomposer cette rouille. En faisant passer un courant continu, les ions positifs (Fe3+) présents dans la rouille migrent vers la cathode (pole négatif) (l’objet rouillé), où ils sont réduits en fer métallique. La rouille se détache ainsi progressivement.
Tout d’abord, il est bon de noter que l’état naturel du fer est l’état oxydé. Le fer métallique est obtenu par un traitement du minerai rouge contenant des oxydes de fer dans les hauts fourneaux, il tend à retourner à l’état oxydé lorsqu’il est exposé à l’air et à l’eau puisqu’il s’agit de sa forme naturelle.
La rouille est donc le résultat de l’oxydation du fer lorsqu’il est en présence de dioxygène et d’eau par le biais de phénomènes chimiques appelés oxydoréduction. La rouille est une structure cristalline complexe composée principalement d’oxydes de fer mais aussi d’hydroxydes de fer.
Voici de l’équation bilan très simplifiée de formation de la rouille
4Fe + 3O2 + 6H2O → 4Fe3+ + 12OH– → 4Fe(OH)3 → 2Fe2O3 . 3H2O
Dans les différents processus rentrant dans cette équation on retrouve la réduction du dioxygène de l’air dissous dans l’eau :
⇒ O2 + 2H2O + 4e– → 4OH–
Ainsi que l’oxydation du fer :
⇒ Fe + 2OH– → Fe(OH)2 + 2e–
On voit ainsi que l’eau et l’air sont nécessaire à l’apparition de la rouille. Une solution saline (eau de mer, route salée humide,…) favorise les déplacements ioniques de réaction d’oxydoréduction et donc augmente la vitesse de formation de la rouille.
Il est heureusement possible de créer une autre réaction d’oxydoréduction afin de détruire cette rouille en créant des ions H+ autour de la pièce métallique par électrolyse de l’eau :
2H2O (liquide) → 2H2 (gazeux) + O2 (gazeux)
Ces ions H+ vont s’allier aux ions O– contenus dans l’oxyde de fer Fe2O3 et faire disparaitre la rouille.
2 Le matériel
– Un bac en plastique, le mien fait l34cm x L45cm x h 27cm ce qui fait 30 litres d’eau lorsque je le remplis aux 2/3 (bien penser à la longueur et la profondeur pour pouvoir y mettre des baïonnettes longues. Pour me faciliter la vie et soulager mon dos, je le pose sur un chariot à roulette, c’est plus facile pour vider le bac sans avoir à la porter jusqu’à la bonde.

– Un morceau d’acier pour réaliser l’anode (ici une grille, cela augmente la surface par rapport à une pièce massive). Pour me faciliter la vie, j’ai ajouté une tige filetée sur laquelle je viens brancher le chargeur. De plus, j’ajoute une petite caisse en plastique pour éviter le contact entre la baïonnette et la grille sinon court-circuit

– De l’eau, théoriquement de préférence de l’eau de pluie ou de l’eau déminéralisée, mais de l’eau du robinet suffit amplement
– De la soude (soude caustique en cristaux type Saint Marc)

– Une source de courant 12V : J’ai choisi un chargeur de batterie (acheté sur Mano Mano)

ATTENTION il faut un chargeur à l’ancienne car les nouveaux modèles de chargeur de batterie « intelligent » ne fonctionnent pas pour une électrolyse, leur principe est d’analyser le niveau de charge d’une batterie or ici il n’y en a pas donc ça bloque.
3 La mise en œuvre
- Remplir le bac avec de l’eau (pour moi 30 litres environ) et ajouter la soude (minimum 15g par litres, mais je mets plutôt 20-25g/litre, il ne faut pas lésiner sur la soude), bien mélanger et s’assurer que toute la soude est dissoute.
- Déposer l’anode métallique de manière que celle-ci ne bouge pas. Ma grille repose sur des morceaux de bois afin de l’éloigner du fond et offrir une surface maximale et comme je l’ai repliée à la forme du bac, c’est stable
- Brancher la borne + du chargeur à la grille (anode)
- Brancher la borne négative sur la baïonnette à dérouiller (cathode) et la plonger dans le bain électrolytique.
Attention : la pièce à dérouiller ne doit à aucun moment toucher l’anode en acier inox, sinon cela créerait un court-circuit, c’est pourquoi j’ai mon panier plastique.
Attention : Ne pas inverser le sens des bornes sinon cela produira l’effet inverse de l’effet souhaité et augmenterai significativement la corrosion de la pièce à désoxyder. - Brancher le chargeur.

Des bulles commencent à se former : dioxygène (O2) sur l’anode et dihydrogène (H2) sur la cathode. Ce sont les bulles de dihydrogène qui vont permettre à la fois le décollement de la rouille par frottement (action mécanique) et aussi sa réduction par phénomène d’oxydoréduction (action chimique). ATTENTION faire ça à l’extérieur sinon risque d’explosion.
Laisser agir quelques heures. Une fois toute la rouille réduite la baïonnette ne craint rien et peut rester dans le bain électrolytique pendant longtemps. La surface de l’eau est généralement assez sale, ce qui témoigne de l‘action de l’électrolyse.

Après avoir tout débranché, il faut sortir la pièce et la rincer en brossant avec une laine d’acier très fine pour éliminer le résidu présent sur la surface. Attention, à ce stade la baïonnette est de nouveau très vulnérable à l’oxydation, il faut alors rapidement la recouvrir de WD-40, en renouvelant l’opération plusieurs fois. NE PAS LESINER SUR LA QUANTITE DE WD-40.

Remarques :
- Une fois que tout est débranché et que la baïonnette est hors de danger, il faut laisser le bac au repos, ainsi tout le résidu en suspension va se décanter et l’ensemble sera plus simple à nettoyer. En général, je m’en occupe le lendemain matin.
- Il est impératif de bien brosser l’anode une fois sèche afin qu’elle soit efficace lors de l’électrolyse suivante
4. Le résultat
Photos Avant /Après






L’ensemble de la rouille de surface est partie. Il reste du travail pour supprimer les taches mais l’ensemble est déjà pas mal. Sur cette baïonnette 98/05 a.A. sans aucun marquage, témoignant de sa fabrication hative de temps de guerre, j’ai eu la chance de voir apparaître les frakturs (lettres sous couronne faisaient office de poinçon d’acceptation) qui étaient cachées sous la rouille.

